Résumé : Dans cette famille dysfonctionnelle – c’est le moins que l’on puisse dire – la fille, le fils, et la mère tentent de survivre, chacun à leur manière, au père, dangereux chasseur assoiffé de sang. Gilles et sa sœur restent néanmoins soudés, du moins pendant un temps. Car plus le temps passe, plus le petit garçon s’éloigne pour se rapprocher de son père, dont la colère semble contagieuse. La vraie vie est tout simplement celle qui s’oppose à la fausse, celle dont on ne veut pas, qu’on rejette, en attendant mieux. Condamnée à vivre dans l’atmosphère la plus néfaste qui soit, la narratrice trouve ainsi un moyen de survivre : en identifiant l’instant où tout a basculé, se persuadant que si elle parvient à revenir en arrière pour modifier ce moment, tout sera différent. Bien entendu, elle se berce d’illusions, mais personne, ni Monica, ni le lecteur, n’oserait la contredire et lui enlever cette graine d’espoir qui la maintient debout. De toute manière, au fond d’elle-même, cette fillette sait qu’elle n’est pas la responsable du monstre que devient son frère. Le véritable responsable, c’est son père, figure de l’être ignoble et abject par excellence. Et tandis que la petite fille, année après année, se raccroche à cet espoir auquel son esprit rationnel ne peut croire, pour survivre, Gille adopte une autre stratégie : s’allier à l’ennemi. Leurs méthodes sont radicalement opposées, et pourtant visent au même but : devenir prédateur plutôt que proie. Construit autour du champ lexical de la chasse, ce roman nous parle non seulement de chasse, mais aussi et surtout de vie et de mort, de lutte et de soumission. Effectivement, Adeline Dieudonné met en scène un chasseur, incarnant le méchant par excellence, pour lequel aucun repentir n’est possible. Ce genre de personnage figure parmi les plus difficiles à construire qui soient. Ces monstres sont en effet très difficiles à comprendre et absolument impardonnables, et ce, quelle que soit leur sensibilité vis-à-vis des chansons de Claude François. Mais s’il ne suscite aucune compassion, ce père qui n’a de paternel que son nom ne manquera pas d’obséder le lecteur, constamment à l’affût de ses colères et actes violents en tout genre. Ce livre m’a littéralement happée, de la première à la dernière page. En effet, malgré un synopsis peu engageant, l’auteur parvient à mettre en place un décor à la fois très proche de ce que doit être le monde d’une personne sous emprise, mais aussi tout-à-fait surréaliste, de par l’imaginaire d’enfant de la petite fille. Car alors que sa vie est un véritable enfer, son cerveau est empli de cimetières de voitures, de machines à remonter le temps et de Hyènes maléfiques. Ce curieux mélange m’a fascinée, si bien que je suis très rapidement rentrée dans cette histoire. Ainsi, après avoir parcouru ces 262 pages en deux jours à peine (habituellement je lis un livre par semaine), ma seule pensée était : « C’est tout ? ». Car ces 262 pages ne me suffisaient pas, de même que cette fin abrupte : j’en voulais plus. Je précise que ce n’est absolument pas une critique, au contraire, cela contribue à l’effet que provoque ce livre, que je qualifierais de « livre coup de poing », dans le sens où il m’a bouleversée et fait ressentir le mal-être de l’héroïne. Celle -ci est par ailleurs tout-à-fait attachante. Intelligente, débrouillarde, forte et plus vivante que jamais, la jeune fille est bien décidée à survivre, et surtout, à dégager son frère des griffes de son bourreau, quoi qu’il en coûte. Nous ne connaîtrons malheureusement jamais le nom, ce qui, depuis quelques temps, semble être devenu une mode dans les romans à la première personne. Je trouvais cela très original dans un premier temps, mais plus je lis de livres du même acabit et plus cela me lasse. Aussi, une formule m’a semblée à la limite du « gnangnan » : « si elle pensait que le sourire d’un petit garçon en dépendait, elle penserait autrement », si mes souvenirs sont exacts. Mis à part ces détails insignifiants, j’ai adoré ce livre, son atmosphère grisâtre son écriture obsédante, et j’attends avec impatience que paraissent d’autres livres de cette auteur, qui signe là son premier roman. Elise J'aimais la nature et sa parfaite indifférence. Sa façon d'appliquer son plan précis de survie et de reproduction, quoi qu'il puisse se passer chez moi. Mon père démolissait ma mère et les oiseaux s'en foutaient. Je trouvais ça réconfortant. Ils continuaient de gazouiller, les arbres grinçaient, le vent chantait dans les feuilles du châtaignier. Je n'étais rien pour eux. Juste une spectatrice. Et cette pièce se jouait en permanence. Le décor changeait en fonction de la saison, mais chaque année, c'était le même été, avec sa lumière, son parfum et les mûres qui poussaient sur les ronces au bord du chemin.
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AuteursRaphaëlle, 17 ans, grande lectrice, du classique à la science-fiction. Archives
Juin 2019
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