Il y a quelques temps, dans mon article sur La fille de Brooklyn de Guillaume Musso, je soulignais que les thèmes qu’il abordait étaient assez répétitifs. J’avais également la désagréable impression, après avoir lu plusieurs de ses livres, que les personnages n’étaient que des copier-coller les uns des autres, sans véritable personnalité propre. Par ailleurs, j’étais gênée par le fait que les intrigues étaient souvent similaires. Je me suis alors posée une question sur cet auteur : n’est-il réellement qu’une machine à vendre ? Je pense que l’on peut clairement répondre que oui, cet auteur rapporte énormément et les éditeurs auraient tort de s’en priver. Visiblement, Musso a compris la recette d’un livre qui marche et il ne se gêne pas pour l’utiliser, ce qui en fait un auteur tout-à-fait commercial. Mais… est-ce que c’est vraiment mal ? Après tout ce n’est pas parce qu’un livre a du succès qu’il est mauvais, et si l’on prend chacun de ses livres individuellement, ils sont sans aucun doute excellents. En effet, le suspense est toujours au rendez-vous, l’intrigue est bien ficelée, et le style agréable. Mais j’avoue m’être lassée de ces histoires mièvres qui finissent toujours en happy end. Ainsi, même dans un roman comme Je reviens te chercher où Ethan, le héros, finit par mourir, Musso laisse entendre que la vie est quand même belle car dans ses dernières minutes, il a eu le temps de concevoir un enfant avec la femme qu’il aime (oui je spoile et je le fais sans état d’âme car cette fin est tout-à-fait ridicule). Aujourd’hui, j’ai donc décidé de mettre mes idées sur cet écrivain par écrit, et, de manière très méthodologique, de répertorier un à un les différents thèmes dont abuse Musso. Tout d’abord, un véritable Musso n’est pas un Musso si le personnage principal n’a pas de problèmes relationnels avec son père, s’il ne vient pas d’un milieu défavorisé dont il est parvenu à se sortir à la sueur de son front et s’il n’a pas une quelconque fêlure qui fait de lui ce qu’il est (plus cliché tu meurs). Ce héros a également deux choix de carrière qui s’offrent à lui : médecin (Elliot dans Seras-tu là ?, Sam dans Sauve-moi, Garret Goodrich dans Et après) ou écrivain (Tom dans la Fille de papier, Raphaël dans la Fille de Brooklyn). Cet écrivain a succès atteint même un sommet avec Arthur, le personnage principal de l’Instant présent, qui est écrivain et médecin dans le métaroman qu’il écrit sur sa vie. Ensuite, un Musso se doit bien évidemment de mettre en scène une histoire d’amour, toujours entre un homme et une femme bien évidemment (pourquoi se mouiller ?). Car comme tout le monde le sait, il est absolument inconcevable d’être heureux si l’on est célibataire. Si c’est le cas, on a forcément un immense vide à combler au fond de son cœur. En troisième lieu, Musso consacre toujours quelques pages (que dis-je, minimum le tiers pour la fille de Brooklyn et Demain, si pas l’intégralité du livre dans les cas de Central Park, L’instant présent et Sauve-moi) à New York. Mais le monde ne tourne pas autour de New York, d’autant plus que selon moi, localiser l’intrigue dans cette ville n’apporte rien. Toutes ces histoires dont il est question pourraient se passer n’importe où dans le monde, alors pourquoi systématiquement à New York ? Je trouve cela fort dommage que cet auteur qui est aujourd’hui l’un des plus lus par la francophonie se cantonne à ce qu’il connaît et n’élargisse pas davantage ses horizons. Enfin, le Musso par excellence, se doit de parler de drogue et de suicide. Il aime également beaucoup les aéroports et les avions en général, au point que cela vire à l’obsession (L’appel de l’ange, Je reviens te chercher, Parce que je t’aime, Sauve-moi, …) Je voudrais soulever un dernier point négatif : pour écrire cet article, j’ai dû faire quelques recherches, surtout pour les noms des personnages, car ces livres s’oublient aussi vite qu’ils se lisent. Certes, ils sont divertissants, mais à présent ce n’est plus vraiment ce que je recherche dans un livre. J’attends d’un livre un minimum d’originalité, que je ne retrouve plus chez cet auteur. Et pour cette raison, je n’ai pas lu ses deux derniers romans, et je ne pense pas les lire pour le moment.
Et pourtant, comme vous avez pu le constater, j’ai lu une certaine quantité de ses livres. Pourquoi perdre mon temps à lire des livres que je n’aime pas, me direz-vous ? Et bien, parce que je les trouve malgré tout agréables à lire, tout comme j’aime regarder une série avec rires préenregistrés en rentrant d’un examen. Je trouve aussi que Musso a des idées originales, mais qu’il gâche malheureusement en les traitant de manière bien trop plate. Ainsi, j’ai trouvé très inventif de sa part d’avoir imaginé ce que pouvait être la vie d’un homme condamné à vivre un jour par an, dans l’Instant présent. De plus, il présente cette situation comme une métaphore, faisant le portrait d’un homme pris au piège par le temps, qui ne voit pas passer sa propre vie. Il ajoute en outre une dimension métalittéraire au récit, qui m’a beaucoup plue. Mais les fins « Alice au pays des merveilles / en fait c’était un rêve », il faut ARRETER ! C’est décevant, frustrant, banal. Ce genre de conclusion se retrouve en effet dans l’Instant présent, mais aussi dans Parce que je t’aime. Pour conclure, je n’ai vraiment rien contre Musso, mais j’aimerais simplement que la presse arrête de parler de lui comme s’il était le nouveau Voltaire, ce sont simplement des livres divertissants, rien de plus. Ainsi, j’en ai assez de voir des critiques affirmer que « cet homme a un don » ou qu’il parvient à construire des « personnages forts » ou des « personnages sublimés à la psychologie plus complexe qu’il n’y paraît ». Je pense que ce genre de littérature doit tout simplement assumer ce qu’elle est, et je trouve vraiment dommage que des auteurs comme Musso fassent de l’ombre à d’autres bien plus talentueux et créatifs. En résumé, les livres de Guillaume Musso sont bons, je n’en disconviens pas, mais à condition de n’en lire qu’un seul, sinon, on se rend bien vite compte que ce ne sont, en définitive, que les variantes d’une même recette. J’ai par ailleurs récemment appris que l’auteur avait décidé de changer de maison d’édition pour « sortir de sa zone de confort ». J’espère qu’il profitera de ce changement pour se renouveler et prendre en compte l’opinion d’une partie de ses lecteurs. En effet, si la presse est dithyrambique, les critiques sur Babelio restent assez mitigées. Elise
2 Commentaires
6/19/2018 09:47:58
C'est un peu le même sentiment que j'ai en lisant les livres de Dan Brown. Je n'ai jamais lu Musso, mais je suis de moins en moins tentée. En tout cas, j'aime beaucoup ton article, bravo !
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AuteursRaphaëlle, 17 ans, grande lectrice, du classique à la science-fiction. Archives
Juin 2019
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