Résumé : Scout et son frère Jem vivent une enfance paisible dans le comté de Maycomb, entouré d’un voisinage hétéroclite. A quelques maisons de la leur, vit la famille Radley, dont le fils, Boo, n’est pas sorti depuis des années, ce qui intrigue beaucoup les deux enfants. Parallèlement à cela, leur père, Atticus, avocat, défend un noir accusé d’avoir violé une femme blanche. Après vive recommandation de ma sœur (et après deux années passées à remettre à demain cette lecture), je me suis plongée, dans le fameux livre d’Harper Lee, Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur, publié en 1960 et rapidement devenu un classique de la littérature anglaise. Vu les échos que j’en avais eus, je m’attendais à être véritablement bouleversée et transportée par ce roman. Or, je dois bien avouer que cela n’a pas été le cas. Mais ma déconvenue tient probablement aux attentes démesurées que j’avais vis-à-vis de ce livre. Par ailleurs, j’ai bien évidemment, en bonne inculte que je suis, lu ce livre en français et non en anglais, ce qui pourrait fausser mon jugement. Aussi, objectivement, je dois bien admettre que cette lecture fut pour le moins agréable et enrichissante. En effet, les relations entre les personnages sont très bien décrites. L’auteur parvient effectivement à faire transparaître de manière subtile la tendresse et la complexité propres aux liens familiaux. Les sentiments représentés sont également très complexes : Harper Lee ne se laisse en effet pas aller à des simplifications ou à la caricature, et ne prend pas peur face aux sentiments contradictoires de ses personnages. Ainsi, Scout voue une grande admiration à Atticus, tout en ayant honte de son vieux père. Elle ressent également de l’admiration pour Jem, lequel l’aime énormément mais la repousse par moment. Aussi, à l’issue du procès, les deux enfants ont des réactions fort différentes, voire opposées, face à l’injustice. Le personnage de tante Alexandra s’avère aussi plus nuancé qu’il n’y paraît. Lors de ses premières apparitions, elle apparaît comme un personnage froid et austère. Elle donne l’impression de partager l’avis général concernant l’affaire Robinson et semble désapprouver la démarche de son frère. Puis, on comprend qu’elle essaie simplement de s’adapter et de survivre dans le monde où elle vit, à savoir un monde dominé par les Blancs et où il est mal vu de s’opposer à la ségrégation raciale. Cette ségrégation, ce racisme est tellement intégré par la population qu’il semble normal, banal, même aux enfants. Ainsi, certaines réflexions que se fait Scout, qui observe ces événements avec son regard d’enfant, permettent de mieux comprendre comment un homme peut en venir à être raciste : tout simplement parce qu’il a été éduqué dans un environnement tel qu’il n’a pour ainsi dire d’autre choix. Ce roman, au-delà de l’aspect sentimental, est donc très intéressant, car il apporte un autre point de vue sur cette période, et aide à comprendre certains comportements qui nous semblent inimaginables. Ainsi, l’homme aura dans la majorité des cas tendance à suivre le groupe, par facilité. Il reste cependant de l’espoir, puisqu’il restera toujours des hommes tels qu’Atticus, prêts à défendre leurs convictions. Je ne pense pas que l’on puisse juger ceux qui se sont finalement ralliés à l’opinion publique, car le seul à s’être opposé à l’ordre établi a risqué sa propre vie ainsi que celle de ses enfants. Cela nous amène à la fameuse question : « qu’aurais-je fait à sa place, dans de pareilles circonstances et face aux mêmes dangers ? » A méditer. J’ai toutefois eu du mal à rentrer dans l’histoire, car j’ai trouvé le début assez long. En effet, le texte, au début, me donnait l’impression d’une simple succession d’anecdotes puériles. Mais ce qui m’a le plus manqué, c’est l’absence de réel fil conducteur. Effectivement, Scout mène simplement sa vie d’enfant, tandis qu’en filigranes, se déroule le procès de Tom Robinson. J’aurais aimé que cette affaire et l’argumentaire qui l’accompagnait occupe une place plus importante dans le récit. De plus, le choix de donner la parole à une petite fille est intéressant, car elle décrit la situation avec toute l’innocence dont seul est capable un jeune enfant. Cependant, cela altère le réalisme du roman, puisque pour une petite fille de sept ans, Scout tient parfois des propos très adultes et ses raisonnements sont par moments trop pertinents pour être crédibles. L’auteur essaie de contrebalancer ces considérations philosophiques invraisemblables par certains traits infantiles dans le style, ce qui, selon moi, sonne assez faux. En outre, à titre purement personnel, je n’aime pas les écritures volontairement enfantines, artificielles, j’ai l’impression que cela n’a pas tout-à-fait sa place dans la littérature. Je ne peux bien sûr pas achever cet article sans mentionner le personnage de Boo Radley, qui apparaît de manière ponctuelle dans le roman, sans que l’on comprenne véritablement son rôle, du moins jusqu’à la fin du livre. Alors, j’ai réalisé que Boo était en fait une sorte de double de Tom Robinson, un oiseau moqueur, un être différent que les gens ont tendance à malmener sans raisons. Face à ce monde injuste et cruel, Boo a choisi l’isolement, à l’inverse de Tatie Alexandra qui, bien qu’elle ne partage pas -leurs opinions, socialise avec une communauté de femmes blanches persuadées d’être supérieures simplement de par la couleur de leur peau. Ce n’est bien entendu que mon opinion et mon interprétation du roman. Effectivement, ce qui en fait sa richesse, c’est avant tout qu’il offre plusieurs clés d’interprétations, notamment en ce qui concerne le sens métaphorique du titre (à l’origine To Kill a Mockingbird, la traduction française est plus explicite, puisqu’elle reprend le positionnement d’Atticus, à savoir que tuer un oiseau moqueur est un péché). Mises à part les deux petites remarques que j’ai pu faire, je pense que Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur mérite amplement son statut de classique de la littérature, qu’il est véritablement formateur car il pousse le lecteur à comprendre l’incompréhensible et véhicule de très belles valeurs. Je ne regrette pas de l’avoir lu, bien que je me sois attendue à une véritable révélation et que j’aie été, de ce fait, inévitablement déçue. Elise Je voulais que tu comprennes quelque chose, que tu voies ce qu’est le vrai courage, au lieu de t’imaginer que c’est un homme avec un fusil à la main. Le courage, c’est de savoir que tu pars battu, mais d’agir quand même sans s’arrêter. Tu gagnes rarement mais cela peut arriver. Il y a quelque chose dans notre monde qui fait perdre la tête aux hommes. Ils ne pourraient pas être justes s'ils essayaient. Dans nos tribunaux, quand c'est la parole d'un homme blanc contre celle d'un Noir, c'est toujours le Blanc qui gagne. C'est affreux à dire mais c'est comme ça.
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AuteursRaphaëlle, 17 ans, grande lectrice, du classique à la science-fiction. Archives
Juin 2019
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